Actes du colloque "Création et gestion d'une Unité Touristique de Pleine Nature"®
 
THEME III « ANALYSE DES CADRES JURIDIQUES POTENTIELS, REPRODUCTION DU CONCEPT D'UNITE TOURISTIQUE DE PLEINE NATURE, ECONOMIE DES ACTIVITES DE PLEINE NATURE »

"Essaimer en Languedoc Roussillon et... ailleurs" par Charles DENICOURT, président de l'Agence Méditerranéenne de l'Environnement (AME)
" Une aide au développement des zones rurales défavorisées, les financements européens" Michel CARRAUD, Universitaire
"L'apport économique des activités de pleine nature dans le département de la Lozère" Jean DE LESCURE, Vice-président du Conseil général de la Lozère, conseiller général du canton de Villefort
j Questions et commentaires
Gilles ARNAUD Responsable d'activités de pleine nature dans le GARD
Jean de LESCURE à Michel CARRAUD
E. FEUILLADU du Conseil Régional du Languedoc Roussillon
Pierre SPIRITTO Directeur du Comité du Tourisme et de la Société d'économie mixte de la Lozère (SELO)
Synthèse par Melle Catherine RIBOT, Professeur agrégée de Droit Public à l'Université Pierre Mendès France de Grenoble

Jean DE LESCURE, vice-président du Conseil Général de la Lozère, conseiller Général du canton de VILLEFORT, l'Apport Economique des activités de pleine nature dans le département de la Lozère

Je vais vous demander d'abord de bien vouloir excuser le Président Pottier qui devait intervenir à cette heure dans le cadre de notre colloque. Il a été retenu à Mende sur une réunion qui concerne les Gorges du Tarn.

Je vais essayer de vous tenir un langage peut-être un peu plus "terre à terre", d'abord parce que je me considère comme un homme de terrain et ensuite parce que je suis persuadé que quand on parle de développement et de développement touristique, le territoire et les gens qui y vivent restent l'essence de ce développement.

Je voudrais vous faire un petit historique pour vous présenter l'évolution ou plutôt la mutation que notre région a connu depuis une cinquantaine d'années. Je crois que cela donnera un éclairage sur certains comportements.

Les gorges, il y a 50 ans, étaient fréquentées par moins de monde qu'aujourd'hui mais par des agriculteurs locaux. Ils allaient y récolter leurs châtaignes. Ces châtaignes étaient séchées dans des séchoirs que l'on appelle des « clèdes » et lorsque les châtaignes avaient perdu de leurs poids, ils les remontaient à dos de mulet au village. Cela constituait une partie de la nourriture humaine et animale. Je qualifierai cette fréquentation de vitale. D'ailleurs aujourd'hui, quand vous empruntez dans les gorges ces superbes calades que l'on a remis en état, lorsque vous parcourez les béals, ces systèmes d'irrigation, ce sont ces gens qui les ont construits. Je crois qu'il ne faut jamais perdre de vue ce patrimoine, cette culture.

Dans les années soixante, il y a eu une révolution dans notre région. On peut employer ce terme parce que le projet dont on avait parlé, puis qui avait été abandonné, a été finalement réalisé ; il s'agit de l'aménagement hydraulique du bassin du Chassezac.

Révolution parce que cela a été un chantier énorme qui a duré une dizaine d'années et qui s'est traduit par la construction de cinq ou six ouvrages et de quatre centrales hydroélectriques.

Ceci a entraîné un apport démographique important, la population du canton ayant doublé à ce moment-là. Cet apport de personnes de l'extérieur a fait évoluer les mentalités. Je crois que c'est important de le noter parce que cela correspond à l'époque où notre région a quitté sa vocation agricole unique et découvert ses atouts touristiques.

Il est vrai également que la construction de ces ouvrages EDF a été un boom pour l'économie. Cela permet d'obtenir des retombées financières qui ne sont pas négligeables pour les communes qui peuvent ainsi mener à bien des projets.

Dans les années 70, le tourisme se développe très vite. Dans les années 80, la fréquentation augmente parce que les activités de pleine nature se développent et presque sans que l'on s'en rende compte, la sur fréquentation est là.

La sur fréquentation se traduit par des risques de dégradation de cet espace exceptionnel mais fragile. Il y a eu des aménagements sauvages dans les gorges qui présentaient des dangers. Naissent également les problèmes de sécurité, des interventions de secours à répétition liées à des imprudences parfois incroyables.

Devant cette surfréquentation problématique, les élus locaux ont choisi de se mobiliser avec la volonté d'être des visionnaires. Ils ont donc créé ce SIVU mais cela n'a pas été facile. Les maires de Pied de Borne et de Prévenchères ne vous l'ont pas dit, alors je vais vous le dire pour eux : il a fallu qu'ils développent des trésors de persuasion pour arriver à faire admettre à la population et aux élus municipaux la nécessité de s'engager dans cette démarche et sur ce projet. Faire admettre un investissement matériel est possible, mais un investissement immatériel, c'est-à-dire un investissement sur une image, sur un concept est beaucoup plus difficile.

Monsieur FONTUGNE quand il a fait hier son exposé, a fait état à un moment donné de quelques doutes qui lui ont parcouru l'esprit dans une époque qu'il a qualifié de bricolage. Je me rappelle très bien de plusieurs rencontres, de discussions téléphoniques où je voyais chez lui un petit peu de découragement. Je l'ai toujours encouragé en lui disant que quand la volonté existe là où il y a un chemin, mais parfois ce chemin est étroit. Finalement, on s'est engagé et on arrive à ce résultat.

Je pense que pour que les gens adhèrent à cette démarche, il était également important de monter un projet qui allait identifier clairement les objectifs à atteindre. Aujourd'hui, ce projet est pratiquement terminé autour de quatre axes :

  • les investissements matériels,
  • les investissements intellectuels,
  • une étude juridique pour essayer de régler les conflits d'usage,
  • les plans de secours en s'appuyant sur le Service Départemental d'Incendie et de Secours.

On peut admettre que tout cela est aujourd'hui réalisé. On pourrait se dire que tout est terminé mais moi, je préfère dire que l'on est au milieu du guet. Parce que demain, il va falloir que l'on trouve la capacité d'assurer la maintenance, voire l'amélioration de tout cela, et je pense également que nous allons devoir gérer au mieux les retours de ces investissements que nous avons réalisés. C'est l'enjeu de demain et je pense que l'on peut parler de retombées économiques.

Certaines retombées économiques sont quantifiables. Ce sont les entreprises qui interviennent sur le site. Elles sont nombreuses, on a même la chance d'avoir une entreprise qui est installée sur notre canton, en terme d'emplois ce n'est pas neutre car cela représente trois permanents l'hiver, dix personnes dès le printemps et trente personnes en pleine saison. Cela compte dans l'économie d'un petit canton.

Ne pas oublier les entreprises qui n'ont pas leurs sièges sur le canton mais qui travaillent sur le site.

Je n'ai pas les mêmes chiffres que Monsieur FONTUGNE sur la fréquentation, je ne sais pas si il a voulu être prudent ou si on m'a communiqué des chiffres «gonflés», mais ces entreprises préfèrent parler de 7000 à 8000 personnes dans le canyon chaque année et d'à peu prés 1500 personnes sur les faces d'escalade.(voir réponse à une question de Christian FONTUGNE)

Mais je crois que le problème n'est pas là, on ne veut pas faire du chiffre, ce n'est pas notre objectif qui est de bien faire. Ce sont les retombées directes faciles à quantifier.

Les retombées indirectes sont plus difficiles à quantifier sur l'hébergement. Ce qui est évident et important c'est que ces activités participent au maintien de la vitalité dans notre région, au maintien des services et des services publics en particulier.

Le travail quotidien d'un élu, en milieu rural, est de se battre pour que les services publics puissent exister sur son canton. Je pense que pour préserver ces services il faut développer une activité sur nos cantons.

Au niveau du département de la Lozère, cette vocation des activités de pleine nature se retrouve. Je crois même que le département de la Lozère a été le premier en ce qui concerne ce que l'on appelle le tourisme vert.

C'est vrai que dans les années qui viennent nous allons tout mettre en œuvre pour essayer de maîtriser, de gérer au mieux ce développement des activités de pleine nature. C'est une nouvelle économie qui apparaît, ce sont de nouveaux emplois. Les gens recherchent aujourd'hui une prise en charge, cela nécessite qu'ils trouvent facilement les gens qui vont les accompagner dans le choix des activités. Ces nouveaux métiers se développent et ce sont des métiers qualifiants. C'est un gisement intéressant.

En Lozère, on a bien sur les gens qui peuvent accompagner les randonnées, des moniteurs, des guides de pêche. Nous jouons cette carte autant que possible. Car il faut par moment savoir regarder dans le rétroviseur et faire un constat. Le choix des vacances n'est plus fondé uniquement sur l'hébergement, mais plutôt sur le thème de ses vacances, cela veut dire peut être que la qualité de l'hébergement est acquise aujourd'hui.

Le produit loisir prend une véritable dimension. Je crois que dans la préparation des vacances, les gens attachent une grande importance à ce produit loisir, et peut être même encore plus quand le séjour est court. L'improvisation n'est plus d'actualité. Ce n'est peut être plus la mode de partir avec son sac à dos, ou le vent nous porte. Il faut prendre en compte une offre qui est concurrentielle quand on parle de tourisme. Il faut également tenir compte qu'en matière de tourisme, il y a deux clientèles à satisfaire, il y a les professionnels et les gens qui sont des promeneurs.

Quand on parle par exemple de randonnée, il y a les randonneurs et les promeneurs.

Je crois que cela nous mène à plusieurs idées :

  1. la première idée, c'est la prise en charge nécessaire d’une nouvelle économie pour la moyenne montagne qu'il faudra savoir développer. On s'aperçoit que les entreprises de pleine nature sont des entreprises qui se professionnalisent. Jusqu'à présent, il s'agissait d'entreprises qui avaient souvent un statut associatif. Aujourd'hui elles se sédentarisent et se professionnalisent à la fois. C'est une signe encourageant parce qu'elles font appel au tissu local. Je crois que se sont les entreprises qui demandent un bon niveau de qualification beaucoup de brevets d'Etat et au moins des qualifications fédérales. Ces entreprises se heurtent à des contraintes réglementaires importantes, parfois à des problèmes d'accès sur
    les sites. Et là, je crois que l'on trouve le bien fondé de l'Unité Touristique de Pleine Nature.

  2. la deuxième idée c'est qu'on peut considérer une UTPN comme un vecteur très fort pour l'économie de la périphérie. Je crois également que c'est un bon moyen de favoriser une certaine pluriactivité et également un étalement de notre saison. Car ce sont des activités qui peuvent se pratiquer en dehors de la pleine saison. On a un exemple très précis sur notre canton avec une association qui propose un produit d'itinérance dans les Gorges du Chassezac en randonnée pédestre avec un accueil de qualité chez l'habitant, autour de produits de qualité.Je crois que ce sont les clés d'un succès annoncé. J'espère que cela va donner des idées et que cela va se développer.

  3. la troisième idée est celle de maîtriser l'ouverture des sites où se pratiquent ces activités, mais avec la volonté de tout faire pour éviter la banalisation, parce que je crois que la banalisation de notre tourisme conduirait à sa mort.

Je me permettrai de conclure pour remercier les locaux qui ont organisé ce colloque. Je suis très heureux que cela se soit passé aussi bien. Même les cieux ont été avec nous. Je dirai à ceux qui nous ont fait le plaisir de venir ici, parfois de très loin, que vous repartirez avec notre petit coin de Lozère au fond du cœur. Merci.

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